Le temps

(limité) de militer.

Normand Beaudet

Suite à l'article de Rima Elkouri sur le choix de la militance par les étudiants, voici mon expérience personnelle. Je me suis identifié à votre cause.


Quitter l'école pour militer. C'est ce que j'ai fait dans les années '80 face à la menace imminente du guerre nucléaire. Lâcher l'école, marcher avec des survivants d'Hiroshima de Montréal jusqu'à New-York pour l'ouverture de la seconde session spéciale des Nations Unies sur le désarmement. En pleine guerre froide, avec la crise de missiles intermédiaires en Europe, les risques de guerre nucléaire accidentelle étaient à leur apogée. Organisation de manifs, tournée de conférences dans les CEGEPs et Universités, actions de désobéissance civile; ce fut le quotidien. Par la suite, avec des amis militants, j'ai fondé le Centre de ressources sur la non-violence (CRNV). J'ai continué à étudier sur une base occasionnelle, et selon les impératifs des luttes.


J'hésite souvent à témoigner de ce parcours car il n'est pas facile. J'ai eu la chance de vivre avec une conjointe qui aimait travailler en institution, avec des conditions d'emploi et un revenu stable. De mon côté, c'est plutôt la quête continue de soutien financier pour l'organisme, et l'acceptation d'une fluctuation des revenus selon le succès des projets portés par le Centre. Mais je dois avouer que je n'aurais pas fait autrement. Les expériences sont multiples et la conciliation travail et famille est optimale dans la gestion collective d'un organisme. Je ne compte plus les activités captivantes et les rencontres incroyables associé au travail de lutte contre "la folie de l'argent, coûte que coûte".


On ne doit par contre pas oublier que, même au bord de l'abîme, pour lutter efficacement, nous avons besoins d'expertises. L'école nous fournit des chercheurs, des médecins, des avocats, des gestionnaires compétents, des économistes; bref les bases qui permettent aux militants d'élaborer de solides campagnes. L'éducation est indispensable. J'ai travaillé au raffinement des formes d'action non-violente dans le cadre de luttes à l'industrie de l'armement, des luttes autochtones, en prévention des conflits communautaires.


J'ai aussi oeuvré dans le cadre de luttes étudiantes et syndicales contre le recrutement militaire dans les écoles. Nous avons travaillé dans le domaine de la solidarité internationale en Amérique Latine et sur la question de l'abolition de l'apartheid en Afrique du sud. Plus récemment nous avons contribué sur des angles précis à l'opposition aux projets d'hydrocarbures: gaz de schiste, Energie Est et GNL Québec. J'ai aussi aidé au déploiement de la Déclaration d'Urgence Climatique. Il est essentiel de garder un équilibre. La vie militante peut devenir une obsession et vous happer. Si on ne fait pas attention, la militance peux facilement vous brûler, brûler vos proches et vos amis militants.


Toujours chercher l'équilibre entre action militante, vie familiale, se réaliser dans le travail et les engagements dans le communauté.


L'action militante dans le temps est plus utile que la suraction à court termes. Les défis sont immenses, ne pas se laisser emporter.


Bravo pour le choix de l'Action!


Normand Beaudet

CRNV

www.nonviolence.ca